lundi 26 octobre 2015

Nouveau départ

J'évoquais ici même, lundi dernier, le désenchantement qui semblait se manifester parmi les généablogueurs. Désenchantement… ou lassitude devant le caractère répétitif de la recherche et de la saisie des trois actes majeurs qui jalonnent la vie de nos ancêtres : naissance, mariage(s), décès depuis la Révolution ; baptême, mariage(s), sépulture auparavant ?

Il est donc urgent de trouver un nouvel élan. D'autant que vous m'avez mis la pression avec vos commentaires ! J'ai jeté quelques idées sur le papier, ces jours derniers, et quelques pistes commencent à se dessiner.

Tout d'abord, élargir le champ de ses recherches. J'entends par là se documenter sur les régions où ont vécu ceux qui nous ont précédés : pour ma part, la Normandie, l'Anjou, la Sologne, le Béarn, la Bigorre, le Comminges et la liste n'est pas exhaustive. Ne pas se contenter des cartes postales anciennes, bien sûr, car elles connurent leur âge d'or dans les années 1900 à 1920 et ne permettent guère de remonter plus loin dans le temps. Miser plutôt sur les librairies régionalistes, les publications des sociétés savantes, les musées…

Dans le même esprit, se documenter sur les métiers : meuniers, maréchaux-ferrants, tisserands, papetiers… Les dossiers de la revue Nos Ancêtres, Vie & Métiers constituent une précieuse source d'informations et la rubrique intitulée Pour aller plus loin fournit des titres d'ouvrages, des sites internet et des adresses de musées qui permettent d'approfondir le sujet.

Deuxième piste : se focaliser sur un ancêtre. Je garde un excellent souvenir du challenge AZ 2014, que j'avais centré sur ma grand-mère maternelle Julia. Ce fil conducteur m'avait permis d'évoquer la Belle Époque, l'Exposition universelle de 1900, Pau et les Pyrénées, la guerre de 1914-1918, les lieux de villégiature, les repas de fêtes et quantités de sujets connexes.

Pourquoi ne pas renouveler l'expérience, par exemple avec mon grand-père paternel que je n'ai pas connu, certes, mais sur lequel j'ai déjà un certain nombre d'informations, quelques documents et quelques rares photos. Il présente en outre l'avantage d'être né à Paris et d'y avoir vécu jusqu'à sa mort. Les centres d'archives à consulter sont vraisemblablement à portée de quelques stations de bus ou de métro. Alors pourquoi attendre ?

Collection personnelle

Troisième piste : étudier les objets de famille. Une soupière au fond de laquelle figure cette inscription "Mre. Troussier 1858" que je ne parviens à rattacher à aucun événement marquant de cette branche, une bourse en écaille ornée d'un monogramme, quelques missels reliés de cuir, une ceinture tricolore d'élu municipal, une ou deux broches auxquelles sont attachées des légendes familiales, et j'en oublie sûrement. Les objets sont sans doute plus difficiles à exploiter qu'une maison de famille dont il s'agirait de raconter l'histoire, mais ils nous parlent aussi de nos ancêtres, de leurs usages et de leurs goûts.

Ce qui me conduit à évoquer la liste des magasins parisiens préférés de mon père, enseignes prestigieuses ou fournisseurs plus confidentiels, mais qui ont la particularité d'avoir pratiquement tous disparu aujourd'hui ! De quoi alimenter quelques billets nostalgiques…


Si vous avez d'autres suggestions, n'hésitez pas à les partager, vous m'intéresserez sûrement.

lundi 19 octobre 2015

Un certain désenchantement

Depuis quelques semaines, je sens poindre un sentiment mitigé chez mes amis généablogueurs : "triste constat", "en manque de motivation", "grand bazar généalogique", "faire le ménage dans son logiciel", "crise existentielle d'une blogueuse en panne d'inspiration"… les titres des billets sont éloquents !

Et je ne dis rien de celles et ceux qui se sont tus, provisoirement, je l'espère. Ici, clin d'œil appuyé à Nicole ou à Gloria, par exemple.

Que se passe-t-il ?

À mon avis, plusieurs phénomènes se conjuguent pour créer un certain désenchantement. L'automne, tout d'abord : fin des vacances, reprise du traintrain quotidien, chute des feuilles (y compris celles des impôts), apparition des brumes matinales, luminosité en baisse, retour de la froidure et de la pluie, journées qui raccourcissent, tout se conjugue pour nous mettre le moral en berne. Déprime saisonnière, paraît-il. Bon, cela devrait passer ; et avant le printemps, je l'espère.

Après-midi d'hiver aux Tuileries
Collection personnelle

Sentiment d'overdose, ensuite : les innombrables parutions liées au centenaire de la guerre de 1914-1918, le challenge AZ, les généathèmes du mois, tout cela est fort respectable et souvent même passionnant (attention, ne me faites pas dire le contraire), mais cela représente des centaines, voire des milliers de pages à lire… et grignote insidieusement le temps imparti à nos loisirs. Là, je ne vois guère de solution, à part une sélection rigoureuse, mais qui dit choix, dit aussi renoncement. Difficile, donc.

Autre raison, peut-être plus profonde : faute de mots plus appropriés, je la qualifierai de fin de cycle. Je m'explique. Tout sourit au généalogiste débutant. Il survole les registres, butine d'un ancêtre à l'autre, remonte parfois plusieurs générations en quelques heures, collectionne les découvertes inattendues. Tout lui fait miel : les patronymes de ses aïeux, leurs prénoms désuets, leurs métiers parfois disparus, les lieux-dits aux noms poétiques, les carambolages avec l'Histoire majuscule…

J'ai connu cette excitation. Les départements mettaient leurs archives en ligne au fur et à mesure de mes besoins (sauf les Hautes-Pyrénées et le Gers, hein, il ne faut pas rêver quand même). Les alertes Geneanet me fournissaient de nouvelles pistes quasiment chaque semaine et les ancêtres répertoriés dans ma base de données augmentaient de façon prodigieuse. Normal, sauf accident de parcours, leur nombre double à chaque génération, me direz-vous. Si, en plus, vous cherchez à compléter les fratries, si vous répertoriez les parrains, les marraines et les curés, si vous vous intéressez aux collatéraux et aux familles alliées, vous dépassez un jour la dizaine de milliers d'individus ! Et vous commencez à trouver que cela fait vraiment beaucoup de monde…

Mais à trop remonter le temps, l'élan initial finit par s'épuiser. Les "nouveaux" ancêtres se font plus rares. Les arbres ne grimpent pas jusqu'au ciel, ont l'habitude de dire les financiers. C'est également vrai pour les généalogistes. Un jour, vous touchez du doigt un plafond de verre. Pour ceux dont les ascendants habitaient déjà dans la campagne française sous l'Ancien Régime, je situerai le risque de blocage vers le début du XVIIe siècle ou, avec beaucoup de chance, à la toute fin du XVIe. Cela permet d'étoffer l'arbre généalogique jusqu'à la douzième ou la treizième génération, avec quelques maigres feuilles au-delà, mais ensuite cela se complique bigrement.

J'ai peut-être atteint ce stade car il m'arrive aussi, certains matins, de m'interroger devant ma base de données. Par quel bout la prendre ? que faire d'utile et d'intéressant aujourd'hui ? comment progresser dans la connaissance de mes ancêtres ?

Un jour de janvier dernier, j'ai donc ouvert le classeur vert dans lequel je rangeais les feuilles imprimées lors des alertes Geneanet et j'ai inventorié 38 fiches à exploiter. Recherches en ligne, transcription des actes, correction d'erreurs, annotations diverses : à la mi-mai, j'en avais fini avec cette tâche et j'avais saisi dans Heredis plus de 440 nouvelles sources ! Engrangeant au passage quelques sujets d'articles pour le blog.

J'ai également fait un sort à un dossier intitulé "Copies d'actes à enregistrer" qui traînait sur mon bureau depuis… pfff ! Et j'ai parcouru les deux premiers tomes de mon journal de recherches, afin de recenser les points restés en suspens. De quoi m'occuper jusqu'à la fin de l'année, sans doute. Bref, je fais le ménage. Il n'empêche, le temps est peut-être venu de réfléchir à de nouvelles orientations…

J'y reviendrai la semaine prochaine.

lundi 12 octobre 2015

Pour en finir avec les Martin…

… du moins ceux de Haute-Garonne, car ce patronyme étant l'un des plus courants en France, j'ai aussi des ancêtres Martin en Normandie et d'autres du côté de la Mayenne.

Domenge Martin, l'une de mes aïeules à la dixième génération, a épousé Jean Artigues à Aulon le 6 février 1676. Le vicaire de l'époque étant avare de détails, je sais tout juste que Domenge Martin demeurait alors au moulin de Pine. J'emboîtais donc le pas à ceux qui ont publié leur arbre sur Geneanet et je pensais comme eux, en toute bonne foi, qu'elle était la fille d'Arnaud Martin, meunier de Pine, et de Besiane Favaron. Et ce d'autant plus facilement que cette dernière était la marraine de la petite Toinette, née en août 1680. Laquelle se noya quatre ans plus tard, comme je l'ai évoqué dans un précédent billet (1).

C'est en relisant les informations déjà collectées et en parcourant à nouveau les registres paroissiaux qu'un doute s'est insinué dans mon esprit.


Si Domenge est bien la fille aînée d'Arnaud Martin et de Besiane Favaron, elle a été baptisée le 28 octobre 1648. Elle se serait donc mariée à l'âge de vingt-sept ans, ce qui me paraît un peu tardif (mais, bon…) et surtout elle serait décédée en janvier 1713 à l'âge de soixante-quatre ans révolus, et non pas de cinquante-six ans, comme indiqué dans l'acte de sépulture. Les approximations étaient fréquentes à l'époque, j'en conviens, mais les curés rajeunissaient rarement leurs paroissiennes dans de telles proportions ! Il me semblait qu'ils avaient même plutôt tendance à les vieillir…

Je me plongeai à nouveau dans les archives pour tenter d'élucider cette question. Les registres d'Aulon disponibles en ligne commencent en 1639 pour les baptêmes, en 1647 pour les mariages et en 1657 pour les sépultures. Il faut en outre penser à consulter également ceux de Mengué, car l'actuelle commune d'Aulon regroupe les anciennes paroisses de Cazeneuve et de Mengué, histoire de compliquer un peu la tâche des généalogistes amateurs.

Je m'aperçois très vite que les Martin ne manquent pas : plus d'une soixantaine de baptêmes entre 1639 et 1670 d'enfants issus de plusieurs couples. Dont au moins quatre Domenge Martin :
  • Le 26 octobre 1648, la fille d'Arnaud et de Besiane Favaron,
  • Le 15 janvier 1651, celle de Jean et de Jeanne Trenque,
  • Le 16 décembre 1655, celle de Janet et de Jeanne Barus,
  • Enfin le 28 septembre 1657, celle de Bernard et de Peyronne Duclos. 

Alors, laquelle choisir ? Je penche pour la dernière, sans certitude toutefois. Un indice plaide en sa faveur, elle aurait eu cinquante-six ans en 1713 et l'acte de sépulture que j'avais relevé pourrait fort bien être le sien. Mais un seul indice, c'est un peu mince à mon goût (eh oui, j'acquiers de l'expérience au fil des mois).

Un coup d'œil ensuite au registre des sépultures, qui mentionne l'inhumation d'une Domenge Martin à l'âge de vingt-trois ans, le 28 octobre 1669. Tiens, tiens, celle-ci pourrait fort bien être la fille d'Arnaud, si seulement le vicaire avait bien voulu indiquer une filiation (grrr…).

Un petit tour enfin du côté du registre des mariages, histoire d'ajouter à la confusion : pourquoi diable le mariage d'Arnaud Martin et de Besiane Favaron est-il inscrit une première fois à la date du 15 septembre 1647 et une seconde fois à celle du 18 novembre 1653 ? sans autre précision et tous deux signés par le même vicaire, Pierre Caubet ! J'ai déjà rencontré le cas d'une réhabilitation de mariage, pour cause de consanguinité tardivement découverte et d'impossibilité d'annuler le mariage, compte tenu des enfants nés entretemps. Mais ici, rien dans le texte du second acte ne vient conforter cette hypothèse.

Autre bizarrerie : Bernard et Peyronne Duclos sont indiqués comme étant mariés lors du baptême de leur fille Jeanne en avril 1650, mais leur acte de mariage est daté du… 8 novembre suivant !


Bref, je patauge et, contrairement à ce que le titre semblait annoncer, je ne suis pas près d'en finir avec ces Martin-là.

(1) Voir Cent mots pour une courte vie, publié le 27/10/2014.

lundi 5 octobre 2015

Mystère chez les Martin

L'année dernière, à peu près à la même époque, Je saisissais dans ma base de données des informations concernant le couple formé par Arnaud Martin et Besiane Favaron, que je croyais être mes lointains ancêtres du Comminges. Je n'en suis plus aussi sûre aujourd'hui, mais ceci est une autre histoire.

En relisant ces jours-ci mon journal de recherches pour noter les points restés en suspens, je les retrouve et ils m'intriguent à nouveau.

Nous sommes à Aulon, dans l'actuel département de la Haute-Garonne, où Arnaud fut meunier au moulin de Pine au XVIIe siècle. Le couple a donné le jour à six enfants au moins, trois filles, Domenge, Marie et Catherine (nées respectivement en 1648, 1650 et 1655), et trois garçons, Joseph, Pierre et Dominique (nés en 1653, vers 1659 et en 1661).

J'avais sans trop de peine déniché l'acte de baptême de cinq d'entre eux, mais un fait surtout m'avait frappée, le décès des trois garçons en l'espace d'un mois, au cours de l'été 1674 :
  • Tout d'abord, Dominique, le plus jeune, âgé de treize ans, le 19 août,
  • Ensuite Pierre, âgé de quinze ans, le 24 août,
  • Enfin Joseph, âgé de vingt-et-un ans, le 14 septembre.

 Les actes de sépulture rédigés par le vicaire contenaient peu d'informations : Dominique fut enseveli "au tombeau de ses prédécesseurs", Pierre fut "enseveli dans le cimetière de l'église de Mengué après avoir receu le sacrement de pénitence" et Joseph "après avoir receu tous les sacrements".

AD Haute-Garonne
Aulon 1639-1682 1 E 1 vue 209/239

J'ai d'abord pensé à une épidémie, mais rien ne permet de confirmer cette hypothèse. Le guide chrono-thématique de Thierry Sabot ne signale ni peste, ni famine, ni fléau particulier pour 1674. Le registre paroissial d'Aulon pour cette même année tient en peu de pages : cinq baptêmes, deux annonces de publication de bans de mariage et un seul autre décès, celui d'une femme, un mois après avoir accouché d'une petite Toinette.

Alors, que penser ? Je ne puis écarter l'idée d'une maladie contagieuse, qui aurait frappé les trois garçons l'un après l'autre, mais sans aucune certitude. Et surtout comment faire pour en avoir le cœur net ?